La loi sur le vagabondage [1] (Vagrancy act) de 1824 est en vigueur au Royaume-Uni depuis près de 200 ans, et criminalise le sans-abrisme de rue et la mendicité. En février 2022, les ministres britanniques ont enfin confirmé que la loi sur le vagabondage sera abrogée dans le cadre d’un amendement du projet de loi relatif à la police, la criminalité, les peines et les tribunaux de 2021.[2]
La loi sur le vagabondage permet à la police d’arrêter les personnes qui dorment dans la rue
La loi sur le vagabondage de 1824 prévoit différentes dispositions, dont possibilité d’arrêter les personnes qui mendient ou dorment dans l’espace public en Angleterre et au Pays de Galles. Cette loi vise également à « punir toutes les personnes errant dans des granges ou des bécosses, ou dans des logements déserts ou inoccupés, ou en plein air, ou sous une tente, ou dans un wagon, » menaçant par la même occasion les gitans, les Gens du voyage et les Roms. Les peines prévues par cette loi incluent une amende de 1000 livres et le risque d’un casier judiciaire et d’une arrestation. En 2020, 573 personnes ont été poursuivies dans le cadre de cette loi.[3]
Les personnes sans abri doivent être considérées comme des détenteurs de droits et non comme des criminels
La loi sur le vagabondage est depuis longtemps condamnée par le secteur de l’aide aux sans-abri, les défenseurs des droits de l’homme et les chercheurs car elle ne s’attaque pas aux causes profondes du sans-abrisme et ne fait rien pour aider les sans-abri à sortir de la rue. En réalité, les mesures de criminalisation comme celle-ci aggravent la pauvreté et l’exclusion sociale des personnes sans abri, et pourraient éloigner ces personnes des services essentiels et les pousser en lieu et place dans le système de justice pénale. Les personnes vulnérables ne devraient pas être punies pour réaliser des activités essentielles en public, comme dormir, mendier, manger ou s’occuper de leur hygiène personnelle[4]. La loi sur le vagabondage serait également incompatible avec la législation internationale relative aux droits de l’homme. Le droit au logement convenable est reconnu dans le cadre du droit à un niveau de vie suffisant dans l’article 25 de la Déclaration universelle des droits de l’homme de 1948 et dans l’article 11.1 du Pacte international relatif aux droits économiques, sociaux et culturels de 1966, et a été mentionné dans plusieurs autres traités relatifs aux droits de l’homme.[5]
Perspectives d’avenir
Après une grande campagne menée par Crisis, la campagne Scrap the Act,[6] le gouvernement britannique a finalement annoncé son intention d’abroger la loi sur le vagabondage de 1824. Le gouvernement britannique a affirmé que cette décision s’inscrivait dans le cadre de son engagement à éliminer le sans-abrisme de rue. Par ailleurs, le gouvernement a promis d’allouer plus de 800 millions de livres sterling pour lutter contre le sans-abrisme et le sans-abrisme de rue en 2022 et 2 milliards de livres sterling au cours des trois prochaines années. Il compte également développer une nouvelle stratégie pour éliminer le sans-abrisme de rue. Toutefois, le gouvernement a affirmé que pour fournir tous les outils nécessaires à la police, l’abrogation de la loi ne se fera pas avant son remplacement par une législation appropriée, en vue de ne pas affaiblir la capacité de la police à protéger les communautés.[7]
Housing Rights Watch salue l’abrogation de la loi et l’engagement à éliminer le sans-abrisme de rue. Cette réforme est attendue depuis longtemps et est un pas dans la bonne direction. Toutefois, cela n’est pas suffisant et la nouvelle législation et la nouvelle stratégie doivent tenir compte de la législation relative aux droits de l’homme, garantissant à chaque personne le droit d’accéder au logement et aux aides sociales, sans discrimination. Au lieu de maintenir les mesures de criminalisation pour éliminer le sans-abrisme, l’accent doit être placé sur la promotion, la protection, le respect et la non-violation du droit au logement convenable, considéré comme un droit humain et basé sur le principe de dignité humaine[8]. Il importe dès lors de fournir des solutions adéquates de logement et des aides sociales pour les personnes les plus vulnérables et d’encourager les personnes sans abri à faire valoir leurs droits.[9] Dès à présent, le gouvernement britannique devrait continuer de tenir compte des recommandations des Instituts des Droits de l’homme et des ONG, et travailler en étroite collaboration avec les services d’aide aux sans-abri, les militants, les chercheurs et les personnes sans abri lors du développement de leurs nouvelles stratégies et législations. Concernant le projet de loi sur la police, la criminalité, les peines et les tribunaux de 2021, les Rapporteurs spéciaux de l’ONU ont récemment exprimé leurs inquiétudes par rapport à son incompatibilité avec la législation internationale relative aux droits de l’homme.[10]
Autres articles sur la criminalisation du sans-abrisme
[1] Loi sur le vagabondage de 1824: https://www.legislation.gov.uk/ukpga/Geo4/5/83/contents
[2] Projet de loi sur la police, la criminalité, les peines et les tribunaux de 2021: annulation de la loi sur le vagabondage de 1824 :
[3] The UK is heading towards authoritarianism: just look at this attack on a minority:
[6] Scrap the Vagrancy Act : https://www.crisis.org.uk/get-involved/campaign/scrap-the-vagrancy-act/