J.D. et A c. Royaume-Uni (Requêtes n° 32949/17 et 34614/17) [24/10/2019]

 

Date de la décision : 24 octobre 2019

 

Pays : Royaume-Uni

 

Juridiction : Cour européenne des Droits de l’homme

 

Base juridique : Article 14 (interdiction de la discrimination) combiné avec l’article 1 du Protocole n° 1 (protection de la propriété)

 

Objet: La Cour européenne des Droits de l’homme a jugé à l’unanimité qu’il a eu non-violation de l’article 14 combiné avec l’article 1 du Protocole n° 1 à la Convention européenne des droits de l’homme dans le chef de la première requérante et, par cinq voix contre deux, qu’il y a eu violation de l’article 14 combiné avec l’article 1 du Protocole n° 1 dans le chef de la deuxième requérante.

L’affaire concernait la plainte des requérantes qui soutenaient que la nouvelle règlementation des aides au logement dans le secteur du logement social (connue sous le nom informel de « taxe sur la chambre ») les discriminait en raison de leurs situations particulières : la première requérante vivait avec sa fille, lourdement handicapée, alors que la seconde était victime de violence domestique. Elles habitaient toutes deux dans des logements spécialement aménagés.

La Cour a jugé que les requérantes ont été particulièrement lésées par la mesure en cause, qui aboutit à une réduction des allocations versées aux locataires lorsque leur logement comporte une chambre de plus que le nombre autorisé par la règlementation, dans le but de les inciter à déménager.

L’existence d’une aide facultative au logement (Discretionary Housing Payments), qui peut compenser la réduction de l’allocation logement, lui permet de conclure que la différence de traitement dans le cas de la première requérante était justifiée.

Tel n’était toutefois pas le cas pour la seconde requérante : celle-ci bénéficiait en effet d’un programme différent qui avait pour but de permettre aux victimes de violences domestiques de rester dans leur logement, et l’aide facultative au logement ne pouvait en aucun cas résoudre le conflit entre cette finalité et l’objectif poursuivi par la taxe sur la chambre, qui visait à inciter l’intéressée à déménager.

La Cour considère qu’au vu de la substance des griefs des requérantes, il convient de les examiner sous l’angle de l’article 14 et de l’article 1 du Protocole no 1, plutôt que sur le terrain de l’article 8. La Cour rappelle que les personnes qui s’occupent d’un enfant handicapé avec lequel elles entretiennent des liens personnels étroits ainsi que celles, essentiellement des femmes, victimes de violences sexistes peuvent prétendre à la protection de l’article 14.

Elle note également que toute différence de traitement fondée sur l’un des motifs énoncés dans cette disposition est discriminatoire dès lors qu’elle ne repose sur aucune « justification objective et raisonnable ». Les États doivent non seulement se garder de toute discrimination mais également s’assurer que les personnes se trouvant dans des situations sensiblement différentes sont traitées différemment lorsque cela est nécessaire.

Les États bénéficient d’une grande latitude (« ample marge d’appréciation ») pour prendre des mesures d’ordre général en matière économique ou sociale, lesquelles ne peuvent toutefois aboutir à une discrimination. Toute différence de traitement liée au handicap d’une personne ou fondée sur le sexe doit être justifiée par des « considérations très fortes » pour être jugée conforme à la Convention.

 

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French
Jurisdiction: 
Article 14 - Interdiction de la discrimination
Article 1 Protocole 1 - Protection de la propriété
Subject: 
Discrimination
Droit de propriété
Country: 

Fonds

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