Fazia Ali c. Royaume-Uni (App. n° 40378/10) [20.10.2015]

Date de la décision : 20 Octobre 2015

Juridiction : Cour Européenne des Droits de l'Homme (Arrêt de chambre*)

Fondements légaux : Article 6 § 1 (droit à un procès équitable) de la Convention Européenne des Droits de l'Homme.

La requérante, Fazia Ali, est une ressortissante britannique née en 1980 et résidant à Birmingham (Royaume-Uni). En octobre 2006, elle sollicita auprès des autorités municipales de Birmingham une aide au
logement. Elle était sans domicile et, en tant que mère de deux jeunes enfants, elle était prioritaire pour l’attribution d’un logement en vertu du chapitre VII de la loi de 1996 sur le logement. En mars 2007, après que Mme Ali eut refusé une deuxième proposition de logement, les autorités municipales l’informèrent que, en raison de ce refus, elles n’étaient plus tenues en vertu de la loi de 1996 sur le logement de lui faire d’autres propositions : Mme Ali n’avait plus droit à l’attribution d’un logement. Mme Ali pria les autorités municipales de revenir sur cette décision, alléguant qu’elle n’avait pas reçu d’offre écrite formelle quant à la deuxième proposition de logement. En conséquence, une agente d’examen des situations de défaut d’accès au logement employée par la ville mena une enquête. En mai 2007, elle confirma la décision selon laquelle le second refus de proposition de logement de Mme Ali avait déchargé la ville de son obligation envers l’intéressée. Elle concluait en particulier qu’il n’y avait pas de raison de croire que Mme Ali n’avait pas reçu la lettre contenant la deuxième proposition de logement et que, en toute hypothèse, même à supposer que ce fût le cas, il n’en restait pas moins qu’elle était parfaitement au courant de la proposition, qu’elle avait vu le logement et qu’elle l’avait refusé.

Mme Ali tenta de contester devant la "county court" la conclusion de l’enquêtrice selon laquelle elle avait reçu la deuxième proposition de logement par écrit. Toutefois, le juge refusa d’examiner cette
question, estimant qu’il s’agissait d’un point « purement factuel », alors que le recours ne pouvait porter que sur des « points de droit ». Cette décision fut confirmée par la "Court of Appeal" et par la Cour suprême. Celle-ci jugea notamment que le droit de Mme Ali à un logement n’était pas un « droit civil » au sens de l’article 6 § 1 de la Convention européenne des droits de l’homme.

 

Résultats et conséquences de l'affaire : La Cour Européenne des Droits de l'Homme a considéré qu'il n'y avait pas eu violation de l'Article 6§1 de la Convention Européenne des Droits de l'Homme. La Cour a affirmé que le droit de Mme Ali à ce que les autorités municipales de Birmingham lui fournissent un logement était un « droit civil » au sens de l’article 6 § 1 et que, dès lors, Mme Ali avait droit à ce que les contestations à ce sujet soient tranchées par un « tribunal indépendant et impartial » ayant entendu sa cause équitablement.

Le fait que l’enquêtrice n’était pas indépendante n’étant pas contesté, la Cour examine ensuite le point de savoir si la compétence de la "county court" pour réexaminer sa décision était suffisante. Elle conclut que, même si les juges n’étaient pas compétents pour réexaminer complètement les faits, le recours qu’avait pu exercer Mme Ali leur permettait de réexaminer dans une certaine mesure aussi bien les faits que la procédure par laquelle l’enquêtrice était parvenue à sa conclusion. Elle considère qu’en ce qui concerne la « détermination » de droits et d’obligations découlant d’un système de protection sociale, lorsqu’une enquête sérieuse a été menée sur les faits au niveau administratif, l’article 6 § 1 de la Convention ne peut être compris comme imposant que le contrôle exercé par les juges comprenne nécessairement une réouverture complète du dossier avec une nouvelle audition des témoins. Le recours exercé par Mme Ali lui a donc apporté une protection suffisante en ce qui concerne la détermination judiciaire de ses droits civils.

Avant de conclure à la non-violation de la Convention, la Cour a examiné l’ensemble du dispositif légal en cause. Elle y a trouvé réunies plusieurs garanties procédurales importantes quant à
l’enquête menée par l’agente d’examen des situations de défaut d’accès au logement. Finalement, le dispositif légal du Royaume-Uni de fourniture d'un logement aux personnes sans-abri est conforme à la Convention Européenne des Droits de l'Homme.

 

En savoir plus :

Pour accéder à l'affaire dans sa totalité (en anglais), cliquez-ici.

Pour lire le communiqué de presse résumant l'affaire (en français), cliquez-ici.

 

* Conformément aux dispositions des articles 43 et 44 de la Convention, cet arrêt de chambre n’est pas définitif. Dans un délai de trois mois à compter de la date de son prononcé, toute partie peut demander le renvoi de l’affaire devant la Grande Chambre de la Cour. Dans ce cas, un collège de cinq juges détermine si l’affaire mérite plus ample examen. Si tel est le cas, la Grande Chambre se saisira de l’affaire et rendra un arrêt définitif. Si la demande de renvoi est rejetée, l’arrêt de chambre deviendra définitif à la date de ce rejet.

 

 

 

French
Jurisdiction: 
Conseil de l'Europe - Cour Européenne des Droits de l'Homme
Article 6 - Droit à un procès équitable
Subject: 
Droits de l'homme
Homelessness
Country: 

Fonds

Subscribe to receive e-mails from us